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Affichage des articles du octobre, 2022

Fêter la mort, fêter les morts

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En conseil de direction d’un établissement dans le diocèse de Saint-Denis (Réunion), le directeur du collège prend la parole et commence : « alors pour Halloween, cette année, on a prévu… ». Le directeur de l’ensemble scolaire l’interrompt en lui disant que le collège n’organisera rien pour cette fête. La surprise semble de taille, alors que quelques jours après, la pastorale du lycée sort un petit tract : « Halloween, mi conné pa, je fête tous les saints !* ». Des réflexions remontent aux oreilles du directeur de l’ensemble, qui finit par expliquer qu’il est préférable de présenter simplement et avec conviction la Toussaint, sans « attaquer » l’autre fête.  Le plus surprenant dans cette petite anecdote, c’est que cette fête d’Halloween soit devenue aussi systématique, et que sa « célébration » ne puisse plus tellement être remise en question, même dans un établissement confessionnel. Car les origines de cette fête se perdent un peu dans le temps, et plusieurs théories s’affrontent...

Aux parents inquiets de ce que lisent leurs enfants en cours de français

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  aux premières 2 (2022-2023)   Je souhaite prendre au sérieux les questions réitérées de certains parents d'élèves, préoccupés par le contenu des œuvres que l'on fait lire aux jeunes gens - je renonce à me protéger derrière ma liberté pédagogique, celle-ci pouvant ici se conjuguer opportunément avec la liberté de l'artiste, et je prendrai au sérieux leurs interrogations, d'autant plus que celles-ci sont les miennes. C'est poser la question de la valeur éducative de la littérature, et, osons le mot, de sa valeur morale. C'est un risque, dans la mesure où l'esprit de notre temps ne conçoit l'art que libre ; l'art sous contrainte serait en danger d'assèchement. Mais le paradoxe se situe dans les conditions mêmes dans lesquelles la littérature est transmise: à l'école, lieu d'instruction & d'éducation, dont l'ambition morale & civique est répétée, sous formes diverses, dans les instructions officielles depuis qu'il est u...

Une femme d'ordre

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Lire les lettres de Madame de Sévigné c'est voir comment se mêle le jeu à la communication de nouvelles : entendons jeu au sens large, plaisanterie, mot d'esprit, jeu littéraire, connivence avec le destinataire. Mme de Sévigné, notre Épistolière , envoyait deux ou trois lettres par semaine à sa fille; l'un des défis de l'écrivain était de susciter l'intérêt, de séduire le lecteur; d'où la variété et le travail littéraire qui font  un véritable objet d'art  de ce qui n'est, au départ, qu'un moyen de communication.   Cette figure de mère aimante et exclusive, ce symbole de "l'esprit français", j'ai envie d'en souligner aujourd'hui un autre aspect, celui de la femme d'ordre ; et l'on verra à quel point la figure stéréotypée de l'aristocrate plein de morgue, méprisant à l'égard de la populace, se fonde sur une réalité... Pour la lecture de cette sélection de passages, il est à noter que Mme de Sévigné compose so...

ingrates rancoeurs, plaintes aigres & flot d'amertume

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Si nos Cahiers se refusent à traiter de l'actualité, leur goût pour les mots de jadis ne font pas la preuve d'une tentative d'évasion du contemporain - même s'il serait tentant de le faire, à la manière d'un Des Esseintes ou d'un Durtal ; au contraire, la passion pour l'antique, le goût pour la plongée dans les tempêtes d'avant naissent pour nous de l'impression forte de la similitude; notre aujourd'hui est éclairé par l'hier.  Nous avons l'impression de vivre dans l'instable (peut-être a-t-on cette impression à toutes les époques, et les époques de paix, d'harmonie, d'ordre n'existent-elles, peut-être, qu' a posteriori . La Belle Epoque, n'était pas très belle; elle l'est devenue par comparaison avec l'industriel massacre qui a suivi), et la lecture des Anciens, nous prouvant que l'instable est de toutes les époques, est une consolation, un apaisement de nos angoisses.  Voyons Rome au premier siècle:...