AC
Un livret, format
A5, quadrichromie & papier glacé intégral, étalant son gros
budget comme le mâle en rut son vit, vient d’échoir dans ma boîte
aux lettres. Il faut que j’en parle ! Autant pour informer que
pour me défouler, je l’avoue par avance. Aucun titre ni même
lettre ne dit ce qu’il contient. L’illustration de couverture,
car il n’est ni blanc ni neutre, me laisse perplexe : sorte de
puzzle difforme sans sens ni beauté, volontairement moche et
destructuré, feu Derida en est sans doute sadout, avec des chiffres
épars pour faire croire à on ne sait quelle prétention
scientifique ou calculatrice, mais surtout pour faire croire au
couillon qu’il l’est ; et que l’auteur n’a jamais été
complexé par les maths… cela ne nous laisse aucune illusion mais
ouvrons la chose quand même par soucis de rigueur.
Intérieur bleu
outremer foncé, la pauvreté béante du discours dans les pages qui
suivent montre que toute référence au lapis lazuli a échappé à
l’auteur qui ne connaît ni la pierre, ni son histoire, ni son
prix, il ne sait pas pourquoi mais ça fait riche, donc sérieux. Il
s’agit d’une pub pour l’ « Espace Départemental
d’Art Contemporain », en abréviation ça devrait faire EDAC
mais on nous sert en face de chaque mot des lettres qui font le mot
« MEMENTO ». Là je tousse : l’art contemporain
fait mémoire ! Comment peut-on en même temps « faire
mémoire » et se vanter d’avoir pour seule valeur de « faire
nouveau » ? Anachronisme & contradiction, la culture
faite d’inculture et d’ignorance à la fois. On sait à quel
point l’art a touché le fond avec le content-pour-rien mais on
constate une fois de plus qu’on y reste, morfond et patouille, au
fond.
Et le texte, ah mais
le texte : quelle prose ! Tous nos auteurs classiques
peuvent aller se rhabiller pour sûr, je cite la première
phrase : « Nouvel espace d’art contemporain ouvert depuis
deux ans est un écrin de silence en cours de réveil. » (sic)
On croirait avoir la description d’un pavillon des années 70, donc
heureusement irrécupérable, les meilleures années de
l’architecture, béton et ferraille bon marché, par un agent
immobilier analphabète crasseux (sisi ça existe). Dès la première
phrase on se demande si celle qui a écrit ça a été à l’école,
même dans une prime jeunesse fort lointaine, car la phrase en elle
même n’a pas de sens, on nous dira que c’est logique dans une
recherche du non-sens mais je crains que ce ne soit même pas
calculé. Je vous passe le reste du texte qui est d’un ennui et
d’un déjà vu consternant, maniant les « abandonné »,
« ephémère », « périphéries » avec une
délectation qui n’arrive même pas à cacher les copier-coller sur
de précédentes publications tout aussi délectables. On y apprend
juste que le lieu est un ancien couvent carmélite. Le reste n’a ni
sens ni intérêt.
Après quelques
phrases de ce « style », sur le point de vomir, on tourne
la page et s’apperçoit que ça dure 2 pages de plus, signées du
« commissaire d’exposition », ça aussi ça fait plus
mieux, cong. La seule note dit qu’une citation du texte que je n’en
peux plus de lire est de Struart Hall (…) qui a cherché à
déconstruire le terme « populaire ». Non mais sans
blague, là encore nous somme en pleine révolution de la pensée !
Il y a ici 1/ un amour pour le déconstructivisme, seule religion de
ceux qui n’ont que du vide à vendre 2/ un mépris condescendant
pour le « populaire » où l’on place avec dédain tout
lecteur qui oserait émettre un doute sur l’intelligence des
propos. Tournons donc encore promptement la page.
Des « artistes »
sont présentés pages après pages, toutes les photos sont moches,
mal cadrées et sans sens, accompagnées d’un texte trop long qui
nous livre la bonne parole sur chaque « œuvre ». Has
been, l’académisme
totalitaire imposé depuis
Duchamp, qui n’a inventé qu’une chose c’est de ne rien avoir
inventé du tout sauf une nouvelle
façon de profiter du snobisme et de se faire vraiment beaucoup de
tunes avec la bénédiction des benêts qui se font empapaouter
: burlesque.
En conclusion je
n’ai plus besoin de me déplacer pour voir ça puisque ce livret
fait à nos frais (financé par le département, l’IAC et la FRAC)
nous donne tout ce qu’il y a à voir là bas. Le seul intérêt de
cet « art » étant dans le discours déconstruit qui
l’accompagne, quand on nous donne le discours, il n’est plus
nécessaire d’aller voir l’ « expo » qui n’a
rien d’autre à montrer que des chaussettes sales ou des chiures
éparses, se donnant l’image de ce qu’il vaut : rien !
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(c) Juan Romano Chucalescu. |
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