Doutes de Guike

FRIEDRICH, Caspar David
Der Wanderer über dem Nebelmeer
1817-18
Oil on canvas, 95 x 75 cm
Kunsthalle, Hamburg

Gueek pourtant je m'interroge sur l'invasion numérique de mes vie et métier... Qui me connaît ne pourra soupçonner mon propos de réac. Je n'ai jamais eu de cahiers de cours, suis passé de Mc à PC, tenté le  moindre logiciel d'accompagnement, de simulation, d'expérimentation assistée par ordinateur, mes cours sont formatés odt, vidéoprojetés, blogués, ... j'ai tenté le montage video, la p.a.o., le dessin à la souris et le scan à main... , bref passons sur la vanité d'un cv qui n'est là que pour implorer le droit de poser la question : que l'on ne me reproche pas de n'y avoir goûté pour avoir droit d'émettre doute.

Faut-il tout numérique ? la question n'est pas là parce que résolue, et confirmée par l'expérience : c'est non évidemment ! La mafia siliconathée le crie elle-même en interdisant les écrans a l'école de ses propres enfants, les Bill & Steve font l'aveu des limites de ce qui leur donna fortune. Ils veulent des écrans pour enfants, mais pour les enfants des autres. Ma petite expérience d'esclave d'enfants sur le chemin de l'école, définition étymologique du pédagogue, de trente ans pendant lesquels j'ai pu tester nombre de nouveaux outils, comme un gamin découvre un nouveau jouet, me permet de douter de l'avantage, voire même de l'utilité du numérique à l'école. On nous en a vendu et on nous en vend encore de la machine. Mais où poser les limites ? plus simplement va-t-on un jour poser des limites ? va-t-on se rendre compte qu'à force de pouvoir multiplier les options on multiplie les problèmes ? quand vaton taper sur la table pour dire stop ? quand vaton poser à plat la vraie question ? sans les démagogiques scrupules qui nous pensent libres ; sans le pédagogisme étatique qui nous tire vers le bas non seulement parce que c'est un système mais surtout parce qu'il se veut système ; sans la vanité de starac du prof-qui-brille et se croit allapage, à une époque où il suffit d'un seul doigt pour penser ; sans la démocrasseuse illusion qui veut nous faire croire qu'on est tous égaux, prof compris, dans une salle de classe ; sans tous ces orgueils que Démon sait si bien utiliser... parfois il me serait agréable de pouvoir retourner en arrière, de cesser de devoir regarder le progrès comme une évidence positive, voire même comme le bien absolu. Mais n'est-ce qu'il ne peut qu'être dans une société sans dieu, où du coup, l'écran remplace la transcendance, les bits remplacent le Créateur, des pixels pleins les yeux shoutent même un aveugle, drogue dure. Laissez-moi sans mobile ni portable pour quelques instants, je veux un peu de la vie jouir encore.

T. R. SCORFA

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