Méditation sur l’Evangile du jour de la St Joseph (Mt 1, 16.18-21.24a)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

« Jacob engendra Joseph, l’époux de Marie, de laquelle fut engendré Jésus, que l’on appelle Christ. » Cette introduction permet d’ouvrir les yeux de ceux qui ont besoin de retrouver leur généalogie pour y croire. Saint Matthieu est l’évangéliste, l’envoyé, pour les croyants juifs ; il part donc de leurs racines pour faire pousser la plante : Jésus est de la lignée de Jacob, il fait partie de la famille, le premier rôle de St Joseph est de le faire entrer dans cette lignée. Il est déclaré ensuite Christ : c’est le roi-messie que nous attendons (du latin Christus, du grec ancien Χριστός, Khristós « oint »)

« Or, voici comment fut engendré Jésus Christ : Marie, sa mère, avait été accordée en mariage à Joseph ; avant qu’ils aient habité ensemble, elle fut enceinte par l’action de l’Esprit Saint. » On a l’impression d’une contradiction, qu’on recommence le texte à zéro… comme pour préciser que Joseph n’est pas le père biologique de Jésus, qu’il est bien né de Dieu directement en Marie.

« Joseph, son époux, qui était un homme juste, et ne voulait pas la dénoncer publiquement, décida de la renvoyer en secret. » un homme juste bibliquement veut dire bon ; un homme juste aurait du dénoncer la femme adultère mais un homme bon ne peut se résoudre à la voir lapider comme l’exige la loi…

« Comme il avait formé ce projet, voici que l’ange du Seigneur lui apparut en songe » il faut traduire pour nous ce merveilleux morceau de poésie juive car il ne résonne plus comme il devait résonner dans l’auditoire du premier siècle en Palestine : l’ange (de l’ancien français ange, angel, du latin angelus, emprunté au grec ancien ἄγγελος, ángelos, et qui, dans la Septante sert à traduire l’hébreu מלאך, maleakh : « messager »), que nous représentons avec des ailes pour symboliser son zèle à apporter la parole de Dieu, seule parole qui fait ce qu’elle dit C’est pourquoi Saint Jean l’evangéliste commence son évangile (un dérivé du mot grec ἄγγελος donne évangile via le latin evangelium et évangéliser : « répandre la bonne nouvelle ») par dire ce qu’a fait le Verbe (Verbum Dei). Les songes sont pris très au sérieux chez nos anciens, c’est là que Dieu souvent s’exprime, peut-être devrions-nous retrouver un peu cette méditation sur les songes ...

«  et lui dit : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse, puisque l’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit Saint ; elle enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus (c’est-à-dire : Le-Seigneur-sauve), car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. » donner un nom c’est reconnaître l’existence de la chose, c’est pourquoi c’est souvent le père qui donne le nom : on sait que l’enfant vient de la mère, le père doit signer l’oeuvre pour dire qu’il n’y est pas pour rien. Adam a eu pour rôle de nommer les plantes et les animaux, Joseph donne son nom à notre sauveur : Jésus (du grec ancien Ἰησοῦς, Iêsoûs, lui-même issu du prénom hébreu ancien ישוע, Iéshua)

« Quand Joseph se réveilla, il fit ce que l’ange du Seigneur lui avait prescrit. » et c’est à cela que l’on reconnaît que Joseph est un homme juste et bon : il respecte ce qu’il entend dans son sommeil et fait la volonté de Dieu.

SCORFA


Commentaires

  1. Merci, Scorfa. J'ajouterais simplement que quand Joseph assume sa mission, il ne donne pas seulement un père terrestre à Jésus, mais aussi une lignée et un héritage. Il fallait que messie puisse être appelé "Fils de David" par le peuple ; il lui fallait donc un père issu de la Maison de David.

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  2. J'ajoute une chose, cher Scorfa. L'interprétation du geste de Joseph, cherchant à répudier sa fiancée en secret, et qui reste implicite dans l'Evangile, est souvent celle que tu proposes: l'apparence d'adultère, le désir d'éviter la lapidation. Si nous nous mettons à l'école de Saint Jérôme ou de Saint Bernard de Clairvaux, une autre lecture est possible, et permise par le caractère implicite dont j'ai parlé.

    Joseph est un homme juste, issu d'une maison royale, qui ne devait pas méconnaître la prophétie d'Isaïe 7.14: "La vierge concevra et enfantera un fils". Lorsqu'il voit sa virginale fiancée attendre un enfant, il comprend immédiatement qu'elle est la Vierge annoncée par le prophète ; son humilité le pousse à se considérer indigne de rester auprès de celle que Dieu choisit pour engendrer son Fils, et il faut le message de l'ange pour le convaincre d'accomplir sa mission.

    Cette double lecture se trouve d'ailleurs dans la différence de version du vieux Noël "Joseph est bien marié". On a d'un côté le couplet

    Quand Joseph eut aperçu
    Que la femme avait conçu
    Il ne s'en contenta mie,
    Fâché fut contre Marie,
    Et se voulut en aller :
    Joseph est bien marié.

    et de l'autre:

    Quand Joseph eut aperçu
    Que la femme avait conçu
    Il lui dit "ma doulce mie,
    Certes digne ne suis mie,
    D'être à vous apparié :
    Joseph est bien marié.

    Je préfère personnellement la deuxième solution, plus digne de la grandeur de Joseph.

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